Le CPT est caduc ! Il est temps qu’il s’en aille !

Il semble désormais qu’il n’y ait plus rien à espérer du Conseil présidentiel de transition (CPT), une instance créée de toutes pièces par les parties prenantes de l’Accord du 3 avril 2024.
À plusieurs reprises, Magalie Comeau Denis, instigatrice de cet accord signé à l’hôtel Montana et mandataire de M. Fritz Alphonse Jean auprès du CPT, a tenu des propos parmi les plus accablants à l’encontre des conseillers présidentiels. Elle les accuse ouvertement de corruption et de détournement de fonds publics dans l’exercice de leurs fonctions. Selon l’ancienne ministre de la Culture sous le régime transitoire de Boniface Alexandre, ces conseillers ne seraient autres que l’autre face de l’organisation criminelle Viv Ansanm. Deux facettes d’une même médaille, engagées dans une stratégie d’anéantissement de la République d’Haïti, dictée par des forces extérieures.
La prise de position de Mme Comeau Denis a de quoi surprendre, surtout au regard du rôle central qu’elle a joué dans la mise en place de ce pouvoir.
Chacune de ses déclarations publiques concernant le CPT a l’impact d’une bombe à retardement. C’est d’autant plus surprenant que ce sont les signataires de l’Accord de Montana qui ont « élu » Fritz Alphonse Jean « président de la République » lors d’un « scrutin » organisé de manière indirecte.
En juillet 2021, après l’assassinat du président Jovenel Moïse, dès le 30 août, ces mêmes acteurs ont exigé le pouvoir, comme l’a rappelé l’ancien sénateur Rony Mondestin. Mais sur quelle base ? Cette démarche s’est inscrite dans une stratégie visant à préparer l’indécente « élection » du « président de la République » dans un hôtel à Port-au-Prince. Suite à cette « élection », au cours de laquelle Fritz Jean a été désigné, des démarches ont été entreprises auprès de l’ancien Premier ministre Ariel Henry pour procéder à l’installation de « l’élu », un manipulateur en faveur duquel le consentement du peuple n’a été exprimé ni directement ni par l’intermédiaire de ses représentants élus au Parlement.
Cinq inculpés au sein du CPT
Fritz Jean, économiste médiatique, se présente comme un homme d’État sans en posséder la véritable stature. Ancien directeur de la Banque Centrale de la République d’Haïti, il a été largement critiqué pour avoir décidé de vendre la réserve d’or du pays. Cette décision imprudente a lourdement impacté Haïti, et les conséquences en sont encore visibles aujourd’hui. L’or, dont la valeur atteint des sommets sur les marchés mondiaux, prouve que cette liquidation fut une erreur monumentale. À l’échelle mondiale, de nombreux pays reviennent à l’or, et tous cherchent à en acquérir. Mais pendant ce temps, Haïti a vu sa réserve d’or disparaître sous les recommandations de Fritz Alphonse Jean, alors gouverneur de la Banque Centrale et aujourd’hui président du Conseil présidentiel de transition. Dans ce contexte, peut-on encore lui accorder notre confiance pour défendre les intérêts de l’État haïtien ?
Cet homme, qui a un dossier de corruption en cours au cabinet d’instruction, est également accusé, avec ses collègues, d’avoir détourné des fonds publics destinés au service de renseignement du Palais national. C’est peut-être pour ces raisons, et bien d’autres encore, que M. Comeau Denis n’a pas jugé bon de protéger son représentant au sein du CPT. Pourquoi est-ce seulement maintenant qu’elle soulève des inquiétudes ? Quelles sont les promesses non tenues qu’il avait faites à son clan ?
Fritz Alphonse Jean, malgré ce que l’on en dit, n’avait pas un prestige public véritable, à l’exception de celui que les médias lui attribuaient. Au CPT, il agissait comme ses pairs, détournant l’argent public pour nourrir son clan en vue des prochaines élections. À l’instar de ses collègues, il préparait soigneusement la fraude et la corruption afin de s’assurer d’extorquer la volonté populaire.
Dans ce contexte délétère, bien que certaines voix se soient élevées pour demander le départ des conseillers impliqués dans le scandale de la BNC, il n’a pas pu se séparer d’eux. En effet, il était lui-même sous enquête dans une autre affaire de corruption, en cours au cabinet d’instruction, liée à la Commission d’État dirigée par le feu sénateur de l’OPL, Paul Denis, sous l’administration Boniface/Latortue. Prendre le risque de forcer le départ des trois nouveaux inculpés ? Impossible !
Leslie Voltaire, dans une situation similaire à celle de l’ancien gouverneur de la Banque centrale, ne l’avait pas fait, pourquoi le ferait-il lui ? Un CPT comportant cinq inculpés pour des actes de corruption montre clairement que, malgré les discours officiels, la lutte contre la corruption est reléguée au second plan. Combien de temps encore ces hommes resteront-ils considérés comme fréquentables par les puissances occidentales qui les soutiennent ?
Le CPT, un verre brisé
Il existe donc une logique du pouvoir en Haïti : plus on est corrompu, malfaiteur, ou anti-national, plus on a de chances d’obtenir le soutien des élites. Malheureusement, la corruption constitue le consensus solide autour duquel ces élites se regroupent. Ce pacte semble indéfectible.
Le verre symbolisant le CPT est brisé, non seulement à cause de la corruption qui le ronge, mais aussi en raison de son incompétence opérationnelle. Les élections prévues pour novembre 2025, comme annoncé par le CEP, ne pourront plus se tenir pour remettre le pouvoir entre les mains d’élus. Cette gouvernance a échoué. Si le CPT survit aux fêtes de fin d’année, il ne pourra plus exister après le 7 février 2026. Aucun prolongement de délai ne sera accordé. Le temps est à l’action !
Pour les membres de cette coalition gouvernementale, qui depuis plus de trois décennies manipulent la conscience collective, le temps va bientôt suspendre son vol. Il n’est plus possible de poursuivre la même stratégie, consistant à renouveler constamment l’échec à la tête du pays. Il est temps de rompre avec des pratiques qui ont conduit la nation sur cette pente dégradante, affectant tous les secteurs de la société haïtienne.
Comme on le sait, il n’y aura pas de référendum pour changer la Constitution du 29 mars 1987, validée par l’ensemble de la nation, et qui a mis fin aux pratiques délétères du pouvoir personnel ayant marqué la gouvernance politique haïtienne pendant près de deux siècles.
Quant à la tenue d’une conférence nationale, elle reste un sujet douteux dans un pays qui s’est engagé, depuis plus de trente ans, sur la voie de la démocratie libérale et de l’État de droit. Le rétablissement de la sécurité, promis par cette équipe en place, reste, lui aussi, une illusion.
Bâtissons une alternative !
Alors que nous approchons de la fin d’une ère qui n’a jamais véritablement commencé, il est temps de bâtir une alternative réelle face à l’impasse actuelle.
À la fin du mandat de Fritz Alphonse, un autre prendra le relais : Laurent Saint-Cyr, délégué par le secteur privé au sein du CPT. Quelle idée ce non professionnel de l’Etat a- t- il des affaires publiques et de la république. Il n’est plus acceptable de continuer à jouer avec l’avenir de notre pays. Le CPT et le gouvernement dirigé par Alix Fils-Aimé, une autre figure du secteur privé propulsée au sommet de l’État sans expérience ni compétence, ont montré leurs limites. Il est impératif de les écarter pour ouvrir la voie à une gouvernance responsable. À la tête de cette nouvelle direction, un juge de la Cour de cassation devrait être nommé, garant de la légalité et de la justice.
Le départ de ces incompétents doit être immédiat afin de permettre la formation d’un gouvernement responsable, capable de résoudre les problèmes du pays et d’organiser des élections libres et démocratiques, dans le cadre d’un véritable retour à l’État de droit. C’est la solution du bon sens !
De la mise en place du G9 criminel au G9 présidentiel multicolore imposés par les mêmes maîtres, la sécurité publique n’a pas été améliorée, de même que la gouvernance du pays. Il est grand temps d’opérer un changement en écartant ce système devenu obsolète, incapable de se renouveler.
Face aux conséquences désastreuses d’une prise de pouvoir par les groupes criminels, il convient de nous tourner vers une solution saine, en confiant le pouvoir à un(e) membre de la Cour de cassation. En effet, comme je l’ai dit, le recours à la Cour de cassation ne résoudra pas la question de la légalité et de la constitutionnalité de cette nouvelle gouvernance, mais il offrira une solution institutionnelle éprouvée, déjà mise en œuvre lors de précédentes crises politiques aiguës.
Il est grand temps d’agir pour restaurer la stabilité et la justice dans notre pays, des conditions essentielles à son véritable développement économique. Unissons-nous pour tracer la voie de la vérité et du renouveau ! Si cette proposition fait écho en vous, rencontrons-nous sans plus tarder pour en débattre, au-delà de nos divergences politiques.
L’essentiel réside dans le salut de notre patrie commune. Bien que les élites au pouvoir aient failli ces trois dernières décennies, il existe encore des Haïtiens capables de faire la différence. Il est impératif que le peuple reprenne les rênes, car en démocratie, c’est lui qui décide de l’essentiel : ceux qui doivent le gouverner. Ensemble, nous pouvons reconstruire un avenir meilleur. Nous sommes prêts et déterminés ! La volonté collective est la clé de notre renaissance.

Sonet Saint- Louis av
–Professeur de droit constitutionnel et de méthodologie à la faculté de droit et des sciences économiques de l’Université d’ État d’Haiti.
–Professeur de philosophie.
Sous les bambous, La Gonâve, 06 avril 2025.
Tel 44073580
sonet.saintlouis@gmail.com
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