Passeports AES maliens : une souveraineté affichée, mais des documents fabriqués en Europe par une entreprise française

Le 29 janvier 2025, les nouveaux passeports de l’Alliance des États du Sahel (AES) – regroupant le Mali, le Niger et le Burkina Faso – ont officiellement remplacé ceux de la CEDEAO. Ce changement symbolise le retrait des trois pays de l’organisation régionale au nom de leur « souveraineté nationale ». Pourtant, malgré un discours dénonçant régulièrement l’influence française, c’est une entreprise française, Idemia, qui continue de fabriquer les passeports maliens de l’AES.
Idemia, spécialisée dans la sécurité numérique et les documents d’identité, n’est pas une inconnue au Mali. L’entreprise gérait auparavant le recensement administratif RAVEC, un rôle qui lui a valu de vives critiques de la part des autorités maliennes de transition. En 2023, celles-ci l’accusaient même de « prendre en otage » les données du recensement, un différend qui avait été cité pour justifier le report des élections maliennes prévues en 2024.
La tension était telle que, l’année précédente, Jean-Yves Le Drian – ancien ministre français de la Défense puis des Affaires étrangères – et son fils Thomas, employé d’Idemia (anciennement Oberthur), avaient été convoqués par la justice malienne pour des soupçons d’atteinte aux biens publics. Aucun des deux ne s’était présenté, renforçant encore la méfiance à l’égard de la société française.
Malgré ces tensions, le contrat signé en 2015 entre Bamako et Idemia est toujours en vigueur. Les passeports maliens de l’AES sont ainsi fabriqués dans une usine sécurisée d’Idemia située au sein de l’Union européenne.
Selon Olivier Charlanes, porte-parole d’Idemia, environ 25 000 passeports ont déjà été livrés depuis le lancement officiel du nouveau design AES fin janvier. La production continue, avec une moyenne de 12 000 à 16 000 passeports livrés par mois, en fonction de la demande.
Idemia précise que le contrat actuel court jusqu’à fin 2025 et qu’à ce stade, aucune reconduction n’est envisagée. Du côté du gouvernement malien, le silence est de mise : sollicité par RFI, le ministère des Affaires étrangères n’a pas souhaité commenter.
Si le passeport AES est désormais une réalité, il ne permet pas encore de voyager librement partout. Les démarches d’agrément auprès des missions diplomatiques sont en cours, tandis que les anciens passeports CEDEAO restent valables jusqu’à leur expiration.
Ce paradoxe illustre une contradiction récurrente : alors que les autorités maliennes dénoncent l’ingérence française et prônent leur souveraineté, elles continuent de dépendre d’une entreprise hexagonale pour un document aussi stratégique que le passeport national.

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