Leslie Voltaire et le naufrage du CPT : cinq mois de promesses brisées, de corruption galopante et d’insécurité aggravée — le bilan accablant dressé par Me André Michel

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Voltaire, voici votre bilan !


Par Me André Michel / Accord du 21 Décembre / 6 Mars 2025



Le 19 avril 2024, Leslie Voltaire, alors qu’il se préparait, avec ses 8 autres collègues, à prendre les rênes du pouvoir, déclarait sur une station de radio de la capitale :

« le poisson pourrit par la tête, Ariel Henry n’avait pas la volonté politique pour résoudre le problème de l’insécurité et redresser l’État, nous allons le faire ».

Cette adresse de celui qui, ces 5 derniers mois, a assuré la présidence du CPT avait valeur de programme politique ; elle a aujourd’hui celle d’épitaphe et doit être gravée en lettres capitales sur le tombeau de son échec.

La faillite du CPT est actée. Les derniers rapports des Nations-Unies traduisent cet échec avec la plus grande éloquence : plus de 5600 personnes assassinées par les gangs armés et plus de 1.045.000 déplacés internes sous le règne du CPT. La situation générale du pays s’est détériorée de manière exponentielle ces 10 derniers mois. Mais, intéressons-nous au « règne » bavard, dispendieux, corrompu, inefficace à tous les points de vue, de Leslie Voltaire, qui nous éclaire sur ce que sera la suite.


Le CPT avait pour mission de rétablir la sécurité et d’organiser des élections générales dans le pays, selon ce qui est précisé dans le Décret du 12 avril 2024 portant sa création et accessoirement dans l’accord du 3 avril de la même année.
Le fameux Conseil national de sécurité prévu par les textes pré cités n’a jamais été mis en place alors que sa création a bien été annoncée sans que jamais personne ne sache qui en fait partie. Un enfumage que personne n’aurait cru possible au temps des réseaux sociaux.

Leslie Voltaire a accompli vraisemblablement un rêve de jeunesse avec son voyage en Europe pour rencontrer le Pape François et le Président français Emmanuel Macron.

Le niveau d’improvisation dans ce déplacement était remarquable, mais Voltaire a eu quand même sa photo avec le Souverain Pontife, qu’il pourra laisser à ses petits-enfants en guise de bilan de son passage à la plus haute magistrature de l’État. À Paris, il a rencontré Jean-Luc Mélenchon, qui n’occupe actuellement aucune fonction, avant le Président Macron. M. Mélenchon ne s’est même pas donné la peine de signaler la réunion sur ses réseaux, alors que Voltaire a publié les photos sur ses comptes personnels et ceux de la présidence. Quant à la rencontre avec le Président Macron, elle relève du flou artistique. L’Élysée n’a pas jugé important d’organiser une conférence de presse des deux hommes, comme c’est la coutume avec les chefs d’État reçus en audience.

Ce voyage fut une ultime humiliation pour le peuple haïtien.

Leslie Voltaire, toujours dans son grand numéro d’improvisation, a donné, lors de cette tournée, une entrevue lunaire à France 24, où, clairement, il ne maitrisait pas les sujets abordés. C’est avec beaucoup d’aplomb que le Conseiller, à son retour, a déclaré qu’il avait été confier le problème de l’insécurité à Notre-Dame, provoquant incompréhensions et moqueries.
Sous l’administration de Voltaire, l’État a perdu le contrôle des quartiers de Solino, Kenscoff, Lalue, Carrefour Feuilles, Nazon, bas Delmas, le Champ de mars où le Palais est devenu un îlot en danger, incapable d’accueillir le Conseil des ministres.

L’aéroport de Port-au-Prince quant à lui est devenu une coquille vide, sans espoir à court terme d’accueillir des vols internationaux et même régionaux. Pour la première fois de l’histoire de la République, le 2 janvier 2025, jour de la commémoration du jour des Aïeux, ce sont les héros de l’indépendance qui se sont déplacés du MUPANAH à la Villa d’accueil. Les bustes de nos héros ont été utilisés dans une scénographie médiocre. Le CPT avait préféré ne pas se rendre au Champ de mars pour des raisons de sécurité. Il se dit que le buste d’Alexandre Pétion a souffert pendant le déplacement.

Plusieurs massacres ont eu lieu, notamment dans l’Artibonite, au Warf Jérémie, à Tabarre, à Kenskoff. Trois faits en particulier resteront dans les mémoires : les plus de 200 personnes âgées massacrées au Warf Jérémie, le bébé jeté dans un brasier à Kenscoff dont la mère devait mourir de chagrin quelques heures plus tard et la mère hurlant à Delmas 30 alors que le cadavre de son fils était transporté dans une brouette.

Nous retiendrons du passage de Voltaire la confiscation totale de l’État. Des millions et des milliards ont été décaissés au moindre prétexte et pour rien. Le CPT et le Gouvernement n’ont rien acheté comme matériel pour les forces de l’ordre, même pas un couteau, contrairement à l’administration précédente.

Le « budget de guerre » dont le CPT parle ad nauseam demeure théorique. Des montants exorbitants, qui ont un destin que tout le monde connait, sont décaissés tous les mois pour le renseignement. La venue du président Petro a couté 3 millions et demi de dollars, les fêtes de fin d’année 1.5 milliards de gourdes, le carnaval 3 millions de dollars et plus, un terrain pour les Forces armées, a été surfacturé de 5 millions de dollars avec l’aide d’un prête-nom. Voltaire, pour faire diversion, sortir « l’affaire » de l’actualité a fait une offensive contre les sanctionnés qui supportent pourtant son pouvoir. On sòti krab.

L’administration publique et la diplomatie ont été jetées en pâture. Des ventes de postes, des récompenses, des remplacements et nominations contre paiements ou promesses de pots-de-vin ont émaillé ces 5 derniers mois. Tout est confisqué au profit des neuf conseillers présidents qui croulent sous les privilèges et l’argent. Depuis 1986, la perception de la corruption n’avait jamais atteint ce seuil. Port-au-Prince bat le triste record depuis février 2025 de « ville la plus dangereuse du monde » alors qu’elle n’était classée que 22ème lors de la publication des dernières statistiques.

À la veille de son passage de témoin avec le Conseiller Jean, faisant preuve d’une légèreté aussi spectaculaire que lors de son voyage aux Nations Unies en septembre dernier où il avait, pour partir, pris d’assaut l’avion du Président Kenyan, sans bagages, Voltaire a tenté de se rendre en Guadeloupe. Le voyage, non planifié, dont l’un des points d’orgue était la visite d’un centre commercial, hélas, a été annulé.

Comme dans toute tragédie, l’ironie s’est invitée dans cette fin de règne. Voltaire se gargarisait de pouvoir débloquer « au moins une voie » pendant sa présidence, dans la nuit du 3 au 4 mars, les bandits ont coupé la route qui mène à Jacmel via Seguin. Triste épilogue pour Voltaire.

Le CPT a explosé tous les compteurs, asséné le coup de grâce à la République, caricaturé les Haïtiens. La course à l’enrichissement a été le seul marqueur et le seul achèvement jusqu’ici du CPT qui est passé spécialiste des ratages. Même les dernières opérations avec des drones tueurs ont laissé la population sur sa soif. Elles illustrent toutes les occasions manquées, le non-savoir-faire, le manque de Planification, l’amateurisme de ces personnes qui coutent tellement cher à la République.

Au-delà de l’espoir suscité par le fait que les forces de l’ordre disposeraient enfin du moyen de neutraliser les gangs, nous attendons des résultats concrets dans la lutte contre les gangs armés. Notre position reste inchangée : pas de dialogue avec les GANGS! Pas de négociation avec les GANGS
M. Voltaire, voici le bilan, non exhaustif, de votre échec.

Me André Michel / Accord du 21 Décembre / 6 Mars 2025

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